Des lieux empreints d'histoires - chapitre 1
Il est de certains lieux qui portent en eux les empreintes des histoires qui les ont traversés.
Non pas que les pierres aient les marques physiques de ces moments de vie, mais parce que des hommes et des femmes ont connu là quelque chose qui a modifié leur parcours.Et l'âme de ces instants subsiste, impalpable et présente, dans ces endroits particuliers.
Précédemment dans ce blog, je vous avais invité à une série de "Villes de rêve". Commençons donc sur ce thème des "Lieux empreints d'histoires" une nouvelle série de pages que je vous convie à retrouver au fil des mois.
Pour ce premier chapitre, je vous entraîne au "Château des mineurs", grosse bâtisse néo-féodale qui domine le golfe de La Napoule, à Mandelieu, et qui a marqué l'imagination de plusieurs générations de Ch'tis !
Ses yeux avaient le gris de la Côte d'Opale,
Ses cheveux blondissaient comme les blés de Flandre,
Et son teint de biscuit à la carnation pâle
S'allumait à l'éclat de sa bouche gourmande.
Mais il ne savait rien de ces nuances-là,
N'ayant jamais connu en ses dix ans de vie
Que son coron natal. Il n'avait que cela
Pour peupler sa mémoire et nourrir ses envies:
Les longues maisons basses à l'ombre des terrils,
Les mères balayant les trottoirs des poussières
De noir charbon cendreux; les pluies et les grésils
Qui tombaient chaque jour des ciels sombres d'hiver,
Les pères venant le soir échinés et muets
Des puits qui chaque aurore ingurgitaient les hommes
Ainsi que sacrifice à un monstre affamé
Opprimant ses esclaves comme bêtes de somme.
C'était en ces années où la guerre peuplait
Encor les souvenirs et les lourds cauchemars
De ces petites gens, que l'on venait chercher
Pour qu'ils offrent leurs existences de trimards
Au pays, qu'il fallait relever des décombres
Qui seules subsistaient des années de pénombre.
Il n'avait jamais vu ni montagne ni mer,
Ne connaissait de la campagne que les terres
Où sous les gris nuages poussaient les betteraves,
Et où errait parfois sa silhouette hâve.
Un jour, quelqu'un pensa que ces gamins blafards
Devraient, pour ses bienfaits, rencontrer le soleil.
Les Mines disposaient, semblait-il, quelque part
D'un lieu propice à leur donner un teint vermeil.
Alors, un jour d'été, il prit le train du soir,
Entre des condisciples innocents comme lui.
Les mères cachaient mal les peurs des au revoir,
Mais le convoi partit à l'assaut de la nuit.
Le soleil renaissait quand le train fut en gare.
On les rangea par deux en lignes sur le quai,
Puis on leur signifia le signal du départ
Pour un trajet final qu'ils devraient faire à pied.
C'est alors que le miracle se produisit.
En un lieu que l'on nomme ici "Balcon d'Azur",
Il pensa s'engloutir dans un rêve éveillé:
Tout était bleu, tout était clair, tout était pur,
Comme une nappe immense, la mer scintillait.
Sous l'éblouissement, ses yeux s'écarquillèrent.
Avisant le levant où montait le soleil,
Son rire l'irradia, ajoutant aux lumières
Ornant le paysage d'insondables merveilles.
Ainsi existait bien ce Paradis Terrestre
Du livre que venait lui enseigner sa mère
En cachette des durs commentaires du père
Jugeant calembredaines ces histoires de prêtres !
Il passa sous le porche conduisant à l'asile,
Et tel Monte- Cristo accostant sur son île,
Crut trouver un trésor, découvrant les vieux murs.
Ce n'étaient que créneaux, courtines et tourelles,
Remparts couleur de pains attardés dans le four,
Archères abritant des nids de tourterelles,
Echauguettes saillant sur l'éther alentour.
Dans la salle à manger sous les voûtes d'ogives,
Il imaginait ripailler des chevaliers,
Et aux âtres éteints des hautes cheminées
Cuire des bœufs entiers devant les flammes vives.
Puis il y eut la plage où on le conduisit:
La brûlure du sable où s'ancrent les pieds nus,
Le frôlement des vagues de l'horizon venues,
Et le chant du ressac sur les galets polis.
Dans ce rêve filèrent les heures et les jours.
La nuit, quand le silence inondait le dortoir,
Il montait en catimini jusqu'à la tour
Pour parler aux étoiles d'or dans le ciel noir.
Un matin, il fallut pourtant s'en retourner.
Alors, devant les vagues, il fit cette promesse
Comme à un être aimé qu'il faut abandonner,
De revenir un jour s'offrir à leurs caresses...
Nous fîmes connaissance bien des lustres plus tard...
Un hiver où je rimaillai face à la mer,
Il vint au bord du quai s'asseoir tout près de moi
Et, de fil en aiguille, me conta cette histoire.
Ses cheveux, de moisson, étaient devenus cendre,
Rien ne rappelait plus le teint de sèvres tendre.
Il avait de la vie connu les avatars
Qui pour chacun rendent la sauce douce-amère,
Mais il avait enfoui le serment d'autrefois
Tel un secret caché, au fond de sa mémoire.
Comme en cette légende qu'il avait lue un jour,
Il lui semblait avoir bu un philtre d'amour.
Lors, dans son élysée, il était revenu;
Il était envouté, il ne partirait plus.
Et le jour où la Parque sectionnerait le fil,
C'est ici qu'il reposerait, devant les îles.
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Textes: Patrice Alzina
Photos: Catherine et Patrice Alzina
A bientôt les amis !!!!!!!!